Comment déterminer le début du mois de Ramadhane ?

Comment détermine t-on le mois de Ramadhane selon la tradition prophétique ?
Quelles sont les recommandations du Prophète (SallALLAHou 'Alayhi Wa Salam) à ce propos ?
Pourquoi existe-il des divergences entre les musulmans dans la détermination de ce mois béni ?

Pour répondre à ces questions, il est essentiel de comprendre les bases et le fondements de l'Islam sur ce sujet.

Tout d'abord, ce sont les nouvelles lunes qui déterminent les dates islamiques. ALLAH a fait de l’observation du croissant de lune le seul moyen d’établir les dates des divers évènements islamiques comme les ‘Id et le Hajj. Il dit :

« Ils t’interrogent [ô Muhammad !] sur les nouvelles lunes. Dis : « Elles servent à déterminer les dates pour les gens et pour le Pèlerinage ». »
Sourate 2 - Al Baqara - Verset 189

Plus particulièrement, le Messager (SallALLAHou 'Alayhi Wa Salam) a souligné que l’observation du croissant est exigée dans la détermination du début et la fin du mois de Ramadhane. Un grand nombre de compagnons a rapporté que le Prophète (que les Prières et le Salut d’ALLAH soient sur lui) a dit : « Jeûnez quand vous voyez le croissant. Si vous ne l’apercevez pas, complétez donc à trente jours le mois de Sha'bane. Et rompez votre jeûne à la vue du croissant. Si vous ne l’apercevez pas, jeûnez trente jours. »1

Le Prophète (que les Prières et le Salut d’ALLAH soient sur lui) a pris grand soin de déterminer précisément le commencement de Sha'bane, parce que l'on peut alors compter vingt-neuf jours et observer le croissant de Ramadhane et donc débuter le mois de Ramadhane. Si le croissant n'est pas vu, le mois Sh'abane est complété d'une journée soit trente jours au total puis arrive le mois de Ramadhane (que le croissant soit vu ou non).

Ceci est appuyé par 'Aisha (qu’ALLAH l’agrée) qui a dit : « Le Messager avait l'habitude d'être plus concerné par [la détermination du commencement de] Sha'bane que par [celle de] tout autre mois. Alors, il jeûnait Ramadhane en apercevant le croissant. Si le temps était obscur, il complétait à trente jours [le mois de Sha'bane] et ensuite il jeûnait. »2

Ensuite, des témoins sont nécessaires pour établir l'observation de la Lune. Les savants sont unanimes sur le fait que deux témoins musulmans dignes de confiance sont suffisants afin d’établir l’observation de la lune.

Ceci est basé sur des narrations de nombreux compagnons qui rapportent que le Messager (que les Prières et le Salut d’ALLAH soient sur lui) a dit : « Si deux témoins musulmans témoignent [qu'ils l'ont vu], alors jeûnez ou rompez votre jeûne. »3

Beaucoup de savants pensent même que le témoignage d'une seule personne digne de confiance peut être accepté comme une base pour déterminer le commencement du mois. La preuve est qu’Ibn ‘Umar (qu’ALLAH l’agrée) a dit : « Les gens cherchaient le croissant [de Ramadhane]. J'ai informé le Prophète – qu’ALLAH prie sur lui et le salue - que je l'avais vu. Il a donc jeûné [le jour suivant] et a ordonné aux gens de jeûner. »4

Une fois ces principes abordés et connus, il est possible de répondre aux questions précédemment posées.

Tout d'abord, concernant la question des divergences, il faut savoir que certaines personnes ou gouvernements suggèrent d'employer, exclusivement ou partiellement, des calculs astronomiques pour déterminer la visibilité et la précision de l’observation du croissant.

Ce n'est pas une suggestion nouvelle. Cette hypothèse a été soulevée aux premiers temps de l'Islam et le Prophète (que les Prières et le Salut d’ALLAH soient sur lui) l'a rejetée.

En effet, Ibn ‘Umar (qu’ALLAH l’agrée) a rapporté que le Messager (que les Prières et le Salut d’ALLAH soient sur lui) a dit : « Nous sommes une nation illettrée. Nous n'employons pas l'écriture astronomique ou le calcul [pour notre jeûne]. Un mois est ainsi et ainsi et ainsi (et il a montré ses mains trois fois, pliant le pouce sur la troisième fois, signifiant vingt-neuf jours) ou ainsi et ainsi et ainsi (et il a montré ses mains trois fois, signifiant trente jours). »5

La version d'Abû Dawud ajoute plus loin : « Ainsi, Ibn ‘Umar (qu’ALLAH l’agrée) avait l'habitude de finir le jeûne avec le reste des gens sans compter sur ces calculs. »

Cela montre que le Messager (que les Prières et le Salut d’ALLAH soient sur lui) voulait garder cette adoration simple et au niveau du peuple, loin de l'influence ou du contrôle d’un savoir scientifique spécialisé (douteux).

Cela montre aussi, comme l’a dit Ibn Taymiya (Qu'ALLAH lui fasse miséricorde) que la description de cette nation comme étant illettrée est un éloge, en cela qu’elle est indépendante de tout moyen compliqué dans l’accomplissement de ses adorations de base.

Quiconque rejette cela outrepasserait le consensus des savants respectables, essaierait de gâter la beauté et la simplicité de cette religion, et surtout, désobéirait directement au Messager (que les Prières et le Salut d’ALLAH soient sur lui).

Ensuite, il faut noter que la notion de "réel commencement d'un mois" est une idée fausse qui est malheureusement très répandue et constitue un grand souci pour beaucoup de personnes. En effet, beaucoup de personnes pensent que si nous ne faisons pas de notre mieux pour confirmer les témoignages de ceux qui prétendent avoir observé la lune (par une preuve astronomique et d'autres moyens), alors nous risquerions d'annuler une partie de notre adoration en jeûnant de mauvais jours.

Cette approche est rejetée dans l'Islam de plusieurs manières :

- cela implique des doutes sur la véracité de musulmans justes. Or c'est interdit selon les textes du QurAn et de la Sounna.

- cela s’oppose à la pratique du Messager (que les Prières et le Salut d’ALLAH soient sur lui) qui a accepté l’observation des gens sans délai et sans la comparer à une preuve astronomique.

- cela ressemble au comportement des juifs qui ont rendu étroites les lois ; et ALLAH les a punis en les rendant même plus étroites.

Le Messager (que les Prières et le Salut d’ALLAH soient sur lui) a dit : « Prenez garde à l’exagération dans la religion. En effet, ceux qui sont venus avant vous n’ont péri qu’à cause de leur exagération dans la religion. »6

Cela montre l'ignorance du vrai début d’un mois islamique.

Ibn Taymiya (Qu'ALLAH lui fasse miséricorde) explique ce point : « De nombreuses personnes pensent qu'une fois que la nouvelle lune apparaît dans les cieux, cette nuit sera la première du mois, que les gens la voient ou non. Ceci n'est pas correct ! Elle doit apparaître aux gens et ils doivent la voir pour débuter un mois. C'est pourquoi le Messager (que les Prières et le Salut d’ALLAH soient sur lui) a dit : « Le jeûne commence le jour où vous commencez à jeûner… ». Ce qui signifie : c'est le jour où vous savez qu’il est temps de jeûner.S i vous ne le savez pas, il n’aura aucune valeur pour vous. »7

Cet avis est clarifié par le hadith de Abu Al Bukhturi qui a dit : « Nous sommes allés à la ‘Oumra et avons vu le croissant de Ramadhane à Dhatu ‘Irq. Il semblait avoir deux ou trois nuits. Plus tard, nous avons rencontré Ibn ‘Abbas (qu’ALLAH l’agrée) et lui avons mentionné cela. Ibn ‘Abbas (qu’ALLAH l’agrée) nous a informés que le Messager d'ALLAH (que les Prières et le Salut d’ALLAH soient sur lui) a dit : « ALLAH a mis l’observation du croissant comme indication de Ramadhane. Ainsi, Ramadhane commence la nuit durant laquelle vous le voyez. Si le temps est obscur (nuageux), achevez donc le compte. »»8

Une autre question se pose désormais : "Que faire si ceux qui ont prétendu voir la nouvelle lune ont menti ou se sont trompés ?"

Tant qu'ils ont l’air de musulmans acceptables et dignes de confiance, alors nous devons suivre leur témoignage et jeûner (ou rompre le jeûne). Nous n'avons absolument pas le droit de rejeter leur parole sans une preuve définie (l'application des moyens qui se conforment à la Sunna, comme décrit ci-dessus.)

S'il s’avère qu’ils mentaient, alors le péché sera pour eux seulement et nous serions toujours (si ALLAH le veut) récompensés pour notre attachement à la Sounna.

Une autre cause importante qui explique ces divergences est la désunification des lieux d’observation.

Les hadiths cités comportent un ordre général pour tous les musulmans à se soumettre à l’observation du croissant. Dans le même esprit, Abu Hurayra (qu’ALLAH l’agrée), ‘Aisha (qu’ALLAH l’agrée) et d'autres ont rapporté que le Messager (que les Prières et le Salut d’ALLAH soient sur lui) a dit : « Le jeûne commence le jour où vous commencez à jeûner ; Al-Fitr [‘Id] est le jour où vous rompez votre jeûne ; Al-Adha [‘Id] est le jour où vous sacrifiez. »9

Ainsi, quand la lune est aperçue n'importe où sur la terre, par au moins un musulman digne de confiance, cela signifie que toute la communauté (Oumma) l'a aperçu.

Ainsi, comme indiqué dans les hadiths cités, tous les membres de la Oumma doivent observer le nouveau mois, si l'information leur arrive dans un temps raisonnable pour pouvoir agir en conséquence.

Les moyens de communication dont nous disposons aujourd'hui ne nous permettent-ils pas d'agir en conséquence ?

Shaykh Al Islam Ibn Taymiya (Qu'ALLAH lui fasse miséricorde) conclut : « Pour résumer : une personne qui apprend à temps la vision de la lune afin de jeûner, rompre son jeûne, ou sacrifier, doit le faire. Les textes (de l’Islam) et les récits des anciens indiquent cela. Limiter cela à une certaine distance ou pays contredirait à la fois la raison et la Loi islamique (As Shari’a) »10

Siddiq Hassan Khan, un des plus grands savants du sous-continent indien, a dit : « Si les gens voient le croissant en un lieu, les gens en d'autres lieux doivent se soumettre à leur observation. Ceci est basé sur les hadiths qui expriment le début et la fin du jeûne à l'observation du croissant. Ces hadiths concernent toute la communauté musulmane : quand un musulman voit le croissant, où qu’il soit, son observation est une observation pour tous les musulmans. »11

À cet égard, Mohammed Nasser Ad Din Al Albani, le grand savant du hadith, a dit : « Les positions d’apparition de la lune sont relatives. Ils n'ont aucune frontière définie, frontières que les gens pourraient distinguer et auxquelles ils pourraient se référer. La plupart des savants ne donnent aucun poids aux différences de positions. Ceci est basé sur la signification générale du hadith authentique : « Jeûnez à sa vision ; et rompez le jeûne à sa vision. » Ceci est la vérité et aucune autre ne peut être acceptée. [...] Cela enlève la confusion et laisse le hadith applicable en général à tous ceux qui reçoivent les nouvelles de la vision du croissant de n'importe quel lieu. Il est bien connu que cette question est très facile à accomplir de nos jours. »12

En résumé, la question peut être récapitulée dans les points suivants :

- Le début d'un mois islamique ne peut être décidé (pour le jeûne, le Hadj et autres mois islamiques) que par l’observation à l'œil nu des nouveaux croissants.

- La preuve astronomique ne peut pas être employée pour établir l’observation de la lune, vérifier ou révoquer l’observation de musulmans dignes de confiance.

- Une fois que la nouvelle lune est aperçue n'importe où sur la terre, les gens en tout autre lieu qui apprennent son observation, dans un laps de temps raisonnable afin d’être capable d’utiliser cette information, doivent agir en conséquence.

- Un mois commence quand on aperçoit la nouvelle lune, que cette vision ait lieu avant, après ou au moment de son observation.

Nous demandons à ALLAH de nous montrer la vérité et nous permettre de toujours suivre la Sounna. Et notre dernière invocation est : Al-hamdulillahi rabbil ' alamin.

Extrait de Muhammad Jibaly (Sha’bane 1413)

1 Hadith rapporté par Boukhari et Mouslim
2 Hadith authentique rapporté par Abu Dawud et Ahmad
3 Hadith authentique rapporté par Ahmad, Nassa'i et ad-Daraqutni
4 Hadith authentique rapporté par Abu Dawud et d'autres
5 Hadith rapporté par Boukhari, Mouslim, Abû Dawud et Nassa'i
6 Hadith authentique rapporté par Nasa'i et d'autres
7 Tiré du livre "Al Fatawa" d'Ibn Taymiya (Tome 5, page 203)
8 Hadith rapporté par Muslim
9 Hadith authentique rapporté par Abû Dawud, At-Tirmidhi et d'autres
10 Tiré du livre "Al Fatawa" d'Ibn Taymiya (Tome 5, page 111)
11 Tiré du livre "Ar Rawdhatun Nadiya" de Shaykh Siddiq Hassan Khan (Tome 1, page 224)
12 Tiré du livre "Tamam ul Minna" de Shaykh Al Albani (page 398)

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